“Campus France accompagne les candidats, depuis la construction de leur projet jusqu’à la demande de visa, avec un service public gratuit.”
- Youssef Ziraoui

- 18 juil.
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : 26 août
Arrivé à la tête de Campus France Maroc en 2021, Guillaume Marceny s'apprête à clore un mandat marqué par une relance des relations universitaires franco-marocaines, un regain d’attractivité de la France comme destination d’études, et la mise en place de nouveaux partenariats structurants. Dans cet entretien-bilan, il revient sur les priorités de ces dernières années, les attentes des étudiants marocains, et l’importance d’un accompagnement de qualité.

À la rentrée prochaine, vous quitterez votre fonction après trois ans à la tête de Campus France Maroc. Quel bilan personnel faites-vous de cette expérience ?
C’est une mission qui m’a profondément marqué. J’ai pris mes fonctions dans un contexte bilatéral délicat, à un moment où les relations entre la France et le Maroc étaient en attente de renouveau. Trois ans plus tard, une nouvelle dynamique s’est enclenchée, avec la visite d’État du Président de la République, et la volonté commune d’ouvrir une nouvelle page dans nos relations bilatérales. Avoir accompagné, à mon niveau, ce renouveau de la relation franco-marocaine est une grande fierté.
Sur le plan personnel, cette mission aura été d’une grande richesse : sur la coopération université, sur la complexité des enjeux liés aux mobilités étudiantes, mais aussi sur la confiance et l’énergie qu’il faut mobiliser pour faire émerger des projets utiles et durables. Des initiatives comme la Maison des Alumni ou le dispositif de visas de circulation pour les diplômés resteront comme des jalons importants. Mais ce sont surtout les liens tissés, les échanges avec les étudiants et les enseignants-chercheurs, qui me resteront.
Pouvez-vous rappeler la mission principale de Campus France Maroc ? Accompagnez-vous les élèves tout au long de leurs démarches, du choix des établissements jusqu’à la procédure d’admission ?
Campus France Maroc est le service officiel d’information et d’orientation pour tous les étudiants marocains ou internationaux résidant au Maroc et souhaitant poursuivre leurs études en France. Nous accompagnons les candidats depuis la construction de leur projet d’études jusqu’à la demande de visa : ateliers, entretiens gratuits, appui aux candidatures, préparation au départ… Nous soutenons aussi l’insertion professionnelle des diplômés, notamment via la Maison des Alumni à Casablanca. En 2024, nous avons organisé à l’École Centrale de Casablanca la première édition du Forum Horizons Maroc, réunissant des entreprises proposant des offres d’emploi, au Maroc, pour les diplômés.
Après une période de turbulences désormais derrière nous, la France reste la première destination des étudiants marocains. À quoi attribuez-vous cette attractivité constante ?
Cette année, nous avons enregistré une hausse de 28 % des candidatures, signe de la persistance de l’intérêt pour les études en France. Cette attractivité repose sur des fondements solides : la densité des relations scientifiques et universitaires entre nos deux pays, plus de 250 doubles diplômes franco-marocains, des programmes de cotutelle de thèse, des établissements français présents au Maroc et, plus récemment, la reconnaissance automatique au Maroc des diplômes français. Avec environ 45 000 étudiants inscrits aujourd’hui et 10 000 nouveaux arrivants chaque année, les Marocains forment la première communauté étudiante internationale en France. Ce tissu humain compte : pour beaucoup de jeunes, savoir qu’ils retrouveront sur place des repères, parfois de la famille, est un facteur supplémentaire.
“Cette année, nous avons enregistré une hausse de 28 % des candidatures, signe de la persistance de l’intérêt pour les études en France.”
Comment percevez-vous la concurrence entre les établissements marocains et les établissements français ? Est-ce selon vous une logique de complémentarité ?
La montée en qualité de l’enseignement supérieur marocain est une bonne nouvelle, y compris pour les établissements français. Nous sommes dans une logique de partenariat et de très nombreuses coopérations existent déjà, à l’instar des doubles diplômes que je mentionnais, mais aussi des programmes de recherche partagée et des mobilités des enseignants entre le Maroc et la France. C’est dans cette direction qu’il faut aller. Les étudiants, eux, circulent de plus en plus entre les deux systèmes. Ce qu’ils recherchent, ce sont des formations solides, lisibles et reconnues des deux côtés. La valeur ajoutée vient souvent du croisement des approches pédagogiques et des expertises scientifiques. Le succès des établissements du réseau AfricaSup au Maroc, avec des écoles françaises implantées localement, en est une illustration concrète.
Quels sont aujourd’hui les secteurs d’études ou types d’établissements qui attirent le plus les étudiants marocains ?
Les écoles d’ingénieurs et de commerce sont particulièrement demandées. Chaque année, des milliers de jeunes Marocains se présentent aux concours d’entrée aux grandes écoles françaises, après des classes préparatoires au Maroc, ou même en France. On observe aussi un intérêt croissant pour les formations de niveau bachelor, plus professionnalisantes, les formations en alternance, ainsi que pour les filières de santé. Les sciences humaines et sociales attirent également de nombreux étudiants marocains dans les universités françaises, grâce à la diversité des parcours et à la reconnaissance de leurs diplômes.
On entend souvent dire que les démarches d’admission en France sont devenues plus sélectives. Est-ce le cas ? Quelles en sont les conséquences concrètes pour les candidats marocains ?
Les démarches d’admission ont toujours été sélectives, mais la pression s’est accentuée. Chaque année, les établissements français reçoivent des millions de candidatures du monde entier. Cela impose une exigence accrue de cohérence, de rigueur et de qualité dans les dossiers, car les établissements vont sélectionner les candidats ayant les meilleures chances de réussite. Cela dit, le nombre de places ouvertes continue d’augmenter, dans le public comme dans le privé. L’enjeu, pour les candidats, est donc moins de « décrocher une place à tout prix » que de formuler un projet clair, réaliste et bien argumenté. Il faut être mieux préparé, mieux informé et savoir se positionner. C’est ce à quoi nous travaillons au quotidien.
“Étudier à l’étranger doit être un projet construit, dans un cadre académique reconnu, avec des garanties en matière de qualité d’enseignement et de reconnaissance des diplômes.”
Êtes-vous exigeant quant à la qualité des écoles pour l’octroi des visas étudiants ?
Nous avons une responsabilité partagée avec les services de visas: celle de garantir que les étudiants partent dans de bonnes conditions, avec des perspectives réelles de réussite. Cela implique d’être attentif à la qualité des établissements choisis. Il est de notre responsabilité d’alerter sur certaines dérives, notamment celles de structures privées à but lucratif, heureusement largement minoritaires, qui vendent de faux rêves. Étudier à l’étranger doit être un projet construit, dans un cadre académique reconnu, avec des garanties en matière de qualité d’enseignement et de reconnaissance des diplômes.
Quel conseil donneriez-vous à un étudiant marocain qui souhaite maximiser ses chances d’admission en France ?
Le premier conseil, c’est de s’y prendre tôt et de s’informer sérieusement. Partir étudier à l’étranger ne s’improvise pas : le projet doit être cohérent avec le parcours de l’étudiant, ses résultats et ses aspirations. Ne pas viser non plus que Paris : mieux vaut une formation exigeante et reconnue, même dans une ville moins connue, qu’un établissement douteux dans une grande métropole. Nous proposons des entretiens d’accompagnement gratuits dans nos espaces Campus France, précisément pour aider les candidats à affiner leur choix et construire un dossier solide. C’est un service public, gratuit, qui ne vend rien et n’a rien à gagner, sinon la réussite des étudiants. Nous organisons aussi régulièrement des temps d’échange avec des diplômés et des représentants d’établissements français, que nous relayons sur nos réseaux sociaux. Je recommande aussi une grande vigilance vis-à-vis de certains cabinets privés peu scrupuleux, qui prétendent, contre un paiement, pouvoir garantir une admission ou un visa. Ces pratiques sont trompeuses, coûteuses et souvent sources de grandes déceptions. Rien ne remplace un vrai projet, préparé avec sérieux et lucidité.
Campus France Maroc est présent dans plusieurs villes via les Instituts français. Comment assurez-vous une couverture équitable du territoire ?
Nous souhaitons offrir un accès équitable à tous nos services. Pour cela, nous disposons de cinq Espaces Campus France, à Rabat, Casablanca, Fès, Marrakech et, depuis peu, à Tanger, qui sera inauguré sur le nouveau avec le nouveau site de l’Institut français de Tanger. À cela s’ajoutent deux antennes numériques, à Agadir et Oujda, qui permettent aux candidats de passer leurs entretiens de candidature à distance, sans avoir à se déplacer dans les ECF. Les entretiens d’accompagnement peuvent également être réalisés entièrement en ligne, quel que soit le lieu de résidence de l’étudiant. Par ailleurs, des points d’information sont disponibles dans tous les Instituts français et Alliances françaises du pays. Enfin, nous nous déplaçons régulièrement dans les lycées et établissements d’enseignement supérieur pour répondre directement aux questions des élèves et présenter les démarches d’admission.
Comment Campus France Maroc s’adapte-t-il à la montée en puissance des formations en anglais dans les parcours post-bac ? Est-ce pour vous une source d’inquiétude ou une opportunité ?
Le plurilinguisme est une opportunité, non une menace. La promotion des formations en anglais s’inscrit pleinement dans la stratégie Bienvenue en France. Aujourd’hui, la France propose plus de 1 700 formations en anglais ou bilingues français-anglais, couvrant aussi bien les domaines scientifiques, technologiques, économiques que culturels. Sur notre site, un moteur de recherche dédié permet de consulter l’ensemble de ces programmes. Elle permet de répondre à une demande mondiale, notamment des Marocains qui recherchent des parcours anglophones de qualité, tout en renforçant la place de la France face à la concurrence internationale.
“Campus Fair ou Objectif France sont des salons de qualité, bien organisés, qui valorisent les établissements français.”
Quel rôle jouent selon vous les salons de l’éducation, comme Campus Fair, dans l’accompagnement des étudiants marocains vers les études en France ? Comment voyez-vous la collaboration entre Campus France Maroc et ces événements ?
Ils jouent un rôle complémentaire à notre action. Campus Fair ou Objectif France sont des salons de qualité, bien organisés, qui valorisent les établissements français, y compris à travers des podcasts ou des vidéos relayés toute l’année. Nous travaillons en lien étroit avec eux et accompagnons les établissements dans leur participation.
Quel message souhaiteriez-vous adresser aux élèves et à leurs familles encore hésitants à franchir le pas des études en France ?
Choisir la France, c’est faire bien plus que choisir une formation : c’est vivre une expérience humaine marquante. C’est découvrir un système d’enseignement supérieur d’excellence, reconnu à l’échelle mondiale, qui ouvre de réelles perspectives professionnelles, au Maroc comme à l’étranger.
Mais c’est aussi partir à la rencontre d’étudiants venus du monde entier, se faire des amis, des collègues, des contacts que l’on garde souvent toute une vie. Ce sont des années qui forgent, qui ouvrent les horizons, qui donnent confiance. Et vous ne serez jamais seuls : des centaines de milliers d’anciens sont passés par là avant vous, et sont prêts à partager leurs conseils, leur parcours, leur réseau.
Enfin, quel conseil donneriez-vous aux établissements français qui souhaiteraient développer leur présence au Maroc ?
Le Maroc est un pays partenaire. Ceux qui réussissent ici sont ceux qui s’inscrivent dans la durée, qui construisent des alliances solides avec les universités marocaines, voire qui s’implantent localement. L’avenir, ce sont les formations co-construites, les doubles diplômes, les projets de recherche partagés, les projets qui s’inscrivent dans la durée et qui font sens des deux côtés. Je pense que l’avenir de nos partenariats est fondé sur l’écoute, la réciprocité et une vraie capacité à s’adapter aux attentes d’une jeunesse marocaine exigeante, mobile et ambitieuse.






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