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Au commencement était la lecture

Il n’est plus à prouver que les capacités de lecture des enfants conditionnent leur réussite scolaire, voire professionnelle. Et la lecture à la maison est au moins aussi déterminante. Seulement, à en croire les chiffres du Haut-Commissariat au plan, moins de 3% des enfants marocains de 7 à 14 ans pratiquent la lecture à la maison. Un constat pour le moins alarmant.



Ce chiffre n’est que le premier d’une longue liste. Il apparaît, par exemple, que le nombre de bibliothèques publiques rattachées au ministère de la Culture ne dépasse pas 145, soit une bibliothèque publique pour 200 000 habitants. Le ratio de livres par habitant est de 0,02 livre en moyenne.

Au Maroc, peu de livres sont disponibles pour les élèves à la maison et dans les écoles publiques. Selon l’enquête PIRLS 2011, 53% des enfants ont déclaré qu’ils n’ont aucun ou peu de livres à la maison et 24% ont une (seule) étagère de livres. L’enquête montre aussi que 35% des écoles primaires publiques ne disposent pas de bibliothèque scolaire, tandis que 27% ont une petite bibliothèque (500 titres ou moins).

La présidente du Réseau pour la lecture au Maroc a d’ailleurs interpellé le Chef du gouvernement sur cette question à travers une pétition. Rachida Roky y est écrit : « L’une des raisons de la crise de la lecture au Maroc est l’échec du système d’éducation et de formation à faire aimer le livre aux écoliers. La bibliothèque dans les écoles, espace dynamique dédié à la lecture, est négligée, voire fermée. »

Bibliothèque déserte cherche personnel qualifié

La vision stratégique de la réforme 2015-2030 du Conseil Supérieur de l’Education, de la Formation et de la Recherche Scientifique (CSEFRS) prévoit plusieurs mesures d’accompagnement des bibliothèques scolaires.

Il existe, par ailleurs, des normes internationales pour l’organisation et la gestion d’une bibliothèque scolaire (UNESCO). Ces normes concernent le personnel, les infrastructures, les équipements, les ouvrages, la classification et la gestion de la bibliothèque. Le principal problème dont souffrent les bibliothèques scolaires au Maroc est l’absence de personnel.

Par exemple, dans l’école primaire publique d’Aïn Aouda, à la périphérie de Rabat, le chef d’établissement a dégagé un espace pour servir de bibliothèque scolaire et dispose d’une collection d’ouvrages. Malgré les efforts de l’association de parents d’élèves, depuis plus d’un an, la bibliothèque n’est toujours pas fonctionnelle, faute de personnel.

Il n’y a pas au Maroc de filière de formation pour ce type de profil de poste intermédiaire. L’Ecole des Sciences de l’Information (ESI) est l’institution, sans doute, la plus à même de former des bibliothécaires mais les sortants s’orientent davantage vers l’informatique et l’ingénierie.

Une société civile active

Certaines écoles sont dotées de bibliothèques grâce à des initiatives prises par la société civile. L’Association marocaine pour la solidarité et le développement durable (AMSDD) a par exemple financé une salle culturelle « Entr’act » dans la commune rurale de Sidi Moussa El Majdoub qui se compose de trois espaces modulables : un espace lecture, un espace théâtre et projection ainsi qu’un espace ateliers.

A plus grande échelle, l’association d’appui aux bibliothèques rurales (AABR) créée en 1999, a construit huit bibliothèques scolaires, cinq petites bibliothèques publiques, cinq bibliothèques dans les maisons des étudiants. Elle a également organisé plusieurs sessions de formation ainsi que des activités autour de la lecture des livres et des opérations de cadeaux.

Ces initiatives méritent d’être soutenues et encadrées. La production de normes nationales inspirées de l’UNESCO et la création d’un corps de bibliothécaires scolaires devraient permettre d’insuffler une nouvelle dynamique.


À propos de l'auteur


Pierre Varly est consultant international et auteur de nombreuses études relatives au domaine de l’éducation. Après avoir mis son expertise au service de différents ministères de l’éducation africains, il a fondé un bureau d’études au Maroc.

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